lundi 24 mai 2021

Pourquoi je ne me ferai pas vacciner en 2021.

Je voudrais commencer par parler de timing.

Au début, je voulais publier ce texte après le 24 juin. C’était la date à laquelle le gouvernement du Québec avait promis que "tous les adultes qui veulent se faire vacciner contre la COVID-19 seront vaccinés". On avait besoin d'une cohésion dans la stratégie collective de lutte à la pandémie: je ne voulais pas nuire à ça. 

Ensuite, le gouvernement a annoncé qu’on avait atteint le seuil de vaccination visé au Québec pour cet été et le plan de "déconfinement" a été annoncé. 

Alors je me suis demandé si je devais attendre encore (ou pas) avant de prendre position publiquement. Car tout est dans le timing. La cohésion a fait son travail, il est maintenant le temps d'aborder le sujet de la cohérence.

Soyons clair: Il faut que les doses de vaccins finissent dans des bras et je ne veux convaincre personne du contraire. Ce texte vise à expliquer de façon rationnelle ma position personnelle et je n'ai aucun désir de convaincre qui que ce soit de faire comme moi. À chacun sa vie et ses expériences et sa perception du monde.

J’avais envie que les gens comprennent pourquoi je n’irai pas manger dans un restaurant cet été, ni boire sur une terrasse, pourquoi je ne vais pas enlever mon masque lorsque je sens que "je me sentirais mieux si je le gardais". Envie aussi que les gens comprennent pourquoi je refuserai de participer à certains rassemblements. De toute façon, si un "passeport vaccinal" est mis en place je n’aurai même pas à faire d’effort pour m’exclure des situations "à potentiel de contagion élevé": je n'aurai pas le droit. (En espérant, bien sûr que cette histoire de passeport vaccinal soit temporaire d'ici à ce qu'une immunité collective mondiale soit atteinte ou qu'on classe enfin ce virus avec les autres auxquels nous sommes habitués.)

Parce que : loin de moi l’idée de me positionner contre la vaccination.

C’est un outil qui a fait ses preuves contre une kyrielle de maladies et de virus.

Je pourrais d’ailleurs vous montrer mon carnet de vaccination et vous verriez rapidement que je suis probablement parmi le 10% des personnes les plus vaccinées au pays. Donc non : mon choix n’est vraiment pas motivé par une position anti-vaccin. VRAIMENT pas.

Alors c’est ça : Je ne me ferai pas vacciner cette année.

Mais pourquoi alors?

Êtes-vous déjà allés à LaRonde et fait la très longue file pendant que les gens avec la "passe-flash" ne faisaient pas la file et passaient devant vous parce qu’ils avaient payé plus cher leur droit d'entrée? C’est en grande partie ça, mon argument principal : Je refuse de passer avant les autres parce que mon pays a de l’argent. Surtout que je viens d'un pays qui ne produit pas de vaccins alors que des pays producteurs n'ont même pas 10% de leurs populations vaccinées (dont leur 1% le plus riche, ces gens sont prioritaires, ils doivent voyager et avoir une vie "normale", bien sûr!).

Je pense que ce serait bien d’atteindre une immunité collective mondiale. (Pour bien d'autres maladies aussi, en passant.) Je la souhaite tout en sachant que, comme pour la grippe, les variants de la COVID qui apparaîtront au fil du temps feront probablement leurs lots de morts annuellement. Après tout, une protection de 90% n'est pas une protection de 100%.

Gardons en tête aussi que les virus ne connaissent pas le principe des frontières politiques: Selon moi, on doit s'assurer de protéger les populations plus à risque en priorité et je n'en fais pas partie, évidemment.

Bien sûr, la dose que je me refuse à accepter cette année de se retrouvera pas pour autant dans le bras d’une travailleuse de la santé Brésilienne ou Indienne ou chez une personne de 70 ans à Port-au-Prince. Je le sais bien. Mais ce n’est pas une raison pour que j’accepte mon privilège et que je passe avant ces gens. On est sur le point de jeter des doses au Canada et la pression est forte pour que j'accepte la mienne plutôt que de la jeter. C'est comme forcer un végétarien à manger le restant des steaks des enfants sous prétexte que "l'animal est déjà mort et qu'on ne peut pas téléporter l'assiette aux gens dans des zones de famines". Moi je dis: fallait se prendre une plus petite portion et éviter le gaspillage. La responsabilité est sur les épaules de la personne qui a fait les assiettes, pas sur la personne qui ne veut pas manger.

J’ai passé à travers la dernière année sans vaccin dans une société non vaccinée : je suis capable de le faire encore pendant un an dans un environnement vacciné à 75%. Bien sûr, certains variants sont plus contagieux. Bien sûr, les gens vaccinés et porteurs risquent de me contaminer. Et au pire du pire: j'attrapperai le virus même en faisant mon possible pour ne pas que ça m'arrive.

Vous êtes vaccinés? Vos parents aussi? Tout va bien: Je ne vous mettrai pas en danger. Vous n'avez pas à me craindre. Ceci dit, suis-je moins responsable en refusant de me faire vacciner ou vous l'êtes en refusant de continuer de porter un masque? L'avenir le dira.

Mon moral est bon et c’est loin d’être si difficile pour moi de continuer de limiter mes contacts avec les autres et de faire "relativement" attention. La senté mentale étant à l'ordre du jour ces temps-ci: je vous rassure.

L’OMS demande à nos pays de retarder la vaccination des enfants afin de pouvoir avoir les doses nécessaires disponibles pour les populations vulnérables des pays plus pauvres. Mais nous, ça fait longtemps qu'on ne vaccine plus pour des questions d’empêcher des morts : on veut un retour aux activités économiques et à la vie normale. On veut la "passe-flash" pour nous et recommencer à "profiter de notre situation de privilégiés" sans trop nous préoccuper du sort du monde et de la planète. On veut une troisième dose pour "voyager". C'est à cette vie qu'on est habitué. (lisez le sarcasme, s'il-vous-plaît)

Et nos gouvernements se doivent de répondre à leurs citoyens: ils nous représentent. Je les comprends et je ne les blâme pas, c’est la démocratie. Les gens veulent qu’on prenne la "passe-flash" alors on la prend. Les gouvernements ne sont pas élus pour pratiquer la solidarité internationale et c'est pareil partout. Bienvenue dans le "real-politik". Peu importe aux citoyens d’ici que les infirmières de la zone rouge de Mumbaï ne soient pas vaccinées : on passe devant elles dans la file mondiale en leur chuchotant tout bas "je m’excuse"… On peut même ajouter "Soyez patientes, votre tour s'en vient!" "Merci"" et "Bravo" pour avoir la conscience tranquile.

Moi, j’ai besoin d’avoir la conscience tranquile pour arriver à dormir la nuit. Je ne l'aurais pas si j'allais me faire vacciner en 2021. J'irai peut-être en 2022... ou en 2023... ou jamais. Faudra analyser l'évolution de la situation. Comme tout le monde, j'irai quand j'aurai l'impression que ce sera mon tour.

Ceci étant dit, nos médias diffusent la position de l’OMS, bien sûr. Mais donne-t-on l'importance qu'elle mérite à cette position? Je cite: "L’OMS demande aux pays riches de reporter la vaccination des jeunes et, par le biais du programme COVAX, de permettre aux populations à risque dans tous les pays d’avoir accès aux vaccins." ou "La pandémie ne sera pas finie dans aucun pays tant qu’elle ne sera pas finie dans tous les pays.". 

Les médias nous diffusent ce message de l’OMS, oui, en 30 secondes... puis on passe les 30 minutes suivantes à pousser nos citoyens à se faire vacciner et à applaudir les résultats d’ici et à nous comparer avec les autres provinces et avec les autres pays occidentaux. Et à se demander pourquoi ça ne va pas plus vite et à louanger le retour à la vie normale. Un exercice autant inutile que ridicule (référez-vous à la position de l’OMS pour un rappel à la réalité pandémique et rappelez-vous que cette pandémie a commencée avec UN SEUL CAS alors… c'est pas fini tant que c'est pas fini!). Mais je comprends pourquoi les médias font ça: on ne veut pas donner d'arguments aux citoyens qu'on a qualifiés de "anti-vaccins". 

Bref, pour revenir à la "passe-flash" qui permet de ne pas faire la file… 

Comprenons-nous : attendre dans la file n’est pas un plaisir pour personne. Mais si j’ai le choix entre "prendre la passe et passer devant les autres" ou "attendre mon tour" ou "de revenir quand la file sera moins longue" : je ne choisis pas de dépasser. Je n'ai jamais aimé dépasser ceux et celles qui attendent. Je ne vais pas commencer à faire ça: autant mondialement que localement.

La file d’attente ne s’arrête pas aux limites de nos frontières, elle est mondiale. 

J’attendrai mon tour et je vous laisse passer devant moi avec le sourire: "Après vous, mes chers!"

Je ne voyagerai pas cette année.

Je laverai mes mains souvent.

Je mettrai mon masque.

Je ne vous prendrai pas dans mes bras comme j’en avais l’habitude.

Ça va bien aller quand même 😉

vendredi 8 janvier 2021

Un état policier? Vraiment?

Dernièrement, avec les questions des dénonciations de rassemblements de voisins (encouragées par certaines autorités) ainsi qu'avec les questions de re-confinement plus stricte et de couvre-feu qui entrera en vigueur au Québec, le terme "État policier" a fait son apparition dans le vocabulaire de certains de nos concitoyens. Je l'ai peut-être moi-même utilisé dans des moments d'impatience! Mais, quand j'y pense un peu, je ne crois pas que ce soit l'appellation adéquate.

J'ai une série d'arguments qui ne sont pas "individuellement suffisants" mais dont l'addition me permet d'être quand même rassuré face aux intentions de nos dirigeants. Fiou!

Premièrement, je ne crois pas que le gouvernement de la CAQ soit en train de se transformer en régime autoritaire. Ni même en dictature sanitaire! On les connaît mieux que ça: Dans un monde idéal, les députéEs seraient bien heureux et heureuses de pouvoir mettre le vaccin dans nos réseaux d'eau potable et de pouvoir relancer l'économie au plus vite. La sainte croissance est leur guide suprême! (Bon, il faudrait tout de même prendre le temps d'aller vacciner dans les communautés autochtones sans eau potable mais ce serait quand même bien plus rapide que de vacciner tout le monde! 2021 et on a encore des communautés sans eau saine à boire au Québec: Ne laissons pas la pandémie nous faire oublier ça!) 

Deuxièmement, les Partis d'opposition semblent mieux jouer leur rôle pendant la deuxième vague que pendant la première vague. Personnellement, ça me rassure énormément. Dans le contexte, il me semble que nous avons un parlement qui semble fonctionnel et qui fait de son mieux pour prendre des décisions cohérentes avec sa vision de l'équilibre entre santé physique, santé mentale et "santé" économie. C'est une responsabilité énorme. Chaque pays y va de ses stratégies, chaque pays a sa réalité, chaque pays n'est pas parfait dans ses mesures. Quand on se compare, on peut par contre dire une chose: Qu'on soit d'accord ou non avec les stratégies mises en place, notre gouvernement prend la situation au sérieux et agit. On ne peut pas toujours être les meilleurs mais sachons que nous sommes loin d'être les pires.

Troisièmement, au-delà des intentions du gouvernement lui-même, ce sont les recommandations de la santé publique qui orientent les décisions. Ça fait quand même du bien de voir ce gouvernement s'habituer à écouter un certain discours scientifique. Espérons maintenant qu'il gardera la bonne habitude et fera de même sur les questions de changements climatiques. Y'a de belles courbes à contrôler là aussi!

Ceci étant dit, je continue de dénoncer une vision en silo de notre société. Nous nous en remettons trop souvent à l'opinion de trop d'experts n'ayant pas une vision assez globale en dehors de leurs champs d'expertises. Les contradictions sont inévitables: les épidémiologues voudraient des mesures plus sévères, les pédiatres veulent maintenir les enfants à l'extérieur de l'effort sanitaire, etc. Les citoyens aussi rêvent à des solutions qui leurs conviennent: les commerçants veulent ouvrir leurs commerces, tout le monde veut boucler financièrement sa fin de mois, les gens veulent enterrer leurs morts et visiter leurs malades, etc. Les seuls acteurs à qui on n'a pas demandé de contribuer, ce sont les institutions financières. Pensons-y: une grande partie de nos obligations financières finissent dans les poches des banques. Il serait grand temps qu'on leur demande de faire leur part dans cet effort collectif.

La réalité c'est qu'il est impossible de trouver des mesures qui satisfassent l'ensemble de la société mais il est impératif qu'une casi unanimité des citoyens agisse de façon responsable. Nous connaissons les bons gestes à poser mais nous ne les faisons pas tous tout le temps. Nous ne sommes pas parfaits mais nous faisons de notre mieux. Je pense que notre gouvernements fait de même, avec ses bonnes intentions, ses limites et ses contradictions. Comme nous tous.

Le défi est de trouver cet équilibre. Aucun pays n'y est arrivé à la perfection. Aucun individu non plus.

Bref, M. Legault et sa bande seraient les premiers contents de retourner à la normale... sauf peut-être Geneviève Guilbault qui a l'air d'assumer son rôle d'autorité avec un certain plaisir coupable!

Un État policier? Nous en somme bien loin. (selon moi)

Essayons d'être constructifs et positifs: à première vue, c'est cette année qu'on retrouvera une certaine tranquillité d'esprit et que la vie sociale reprendra peu à peu sa place dans nos vies. Ça aurait pu être bien plus long cette pandémie... on s'en sort collectivement relativement bien (pour cette fois!)!